Suite à mon article sur les différents lignages utilisés pour apprendre à écrire, de nombreux enseignants m'ont posé des questions sur le choix des cahiers de leurs élèves. Je vais donc tenter de leur répondre.
Cahier, feuille ou fichier ?
Il est très courant de faire écrire les élèves, en particulier de cycle 2, sur des feuilles volantes (parfois collées sur le cahier) ou sur des fichiers d'exercices. Il n'est bien entendu pas question de proscrire totalement l'usage de feuilles photocopiées ou de fichiers, mais je voudrais faire attirer l'attention des enseignants sur quelques points de détail, qui ont leur importance :
- écrire sur une feuille déjà collée sur un cahier est inconfortable, la colle est souvent répartie inégalement et crée des aspérités sur le papier ;
- écrire sur un fichier est souvent difficile également : les fichiers sont grands et épais, la pliure centrale crée un dénivelé qui gêne les élèves, le lignage est souvent réduit à un simple trait ;
- il me semble important que les élèves apprennent dès le cycle 2 à se repérer dans l'espace du cahier et à y organiser leur travail.
A cet égard, il peut être pertinent si l'on veut prévoir des exercices sur feuille, d'utiliser des demi-A4, où l'on imprimera une réglure adaptée. La feuille sera ensuite simplement scotchée dans le cahier, entre deux pages, évitant ainsi les paquets de colle qui finissent par rendre inutilisable tout le cahier ! On trouvera des exemples de ce type de fiches sur le blog de Zaubette.
En tout état de cause, il me semble important que les élèves, à partir du CP, écrivent quotidiennement dans leur cahier.
Quelle taille de cahier ?
Lorsque je reçois des enfants en rééducation de l'écriture, ils m'apportent très souvent des cahiers de très grand format, soit 24 cm x 32 cm. Ce format est apprécié des enseignants car il permet de coller une feuille au format A4 tout en laissant un espace autour. Cependant, il est très inapproprié, en particulier pour les élèves les plus jeunes, de CP, de CE1 ou même de CE2.
D'une part, les tables d'école ne sont généralement pas immenses et le cahier grand format envahit à peu près tout l'espace dont l'enfant dispose. D'autre part, il est très difficile de l'incliner. Une fois ouvert, la page de gauche gêne terriblement lorsque l'on veut écrire sur la page de droite, en particulier si le cahier n'a pas de spirales !Et le coin du cahier, qui dépasse de la table, se corne à peu près immanquablement. Du coup, l'enfant a tendance à disposer le cahier face à son torse, ce qui ne facilite pas le bon geste d'écriture. Ou alors, il lui faut écrire avec le bras tendu, ce qui n'est guère confortable...
De plus, comme je l'ai déjà signalé, les épaisseurs successives de colle font que le cahier devient épais et accidenté, ce qui gêne énormément l'écriture. A mon sens, il vaut mieux privilégier les porte-vues (ou lutins) pour ranger les documents A4 donnés par le maître de la classe et réserver les cahiers pour que les élèves écrivent eux-mêmes.
Pour les cahiers de classe, je recommande vivement le classique petit format, 17 cm x 22 cm, à tout le moins pour les petits niveaux de l'école primaire.
Quel lignage ?
Il vaut mieux commencer directement à écrire sur du lignage Seyès - ou sur du lignage Gurvan, qui est un lignage Seyès aménagé. En classe de GS et en début de CP, les enfants n'ont pas une maîtrise suffisante de leur geste pour pouvoir directement utiliser le papier Seyès ordinaire, dont la réglure est de 2 mm. C'est pourquoi il existe une gamme de cahiers Seyès agrandis de 3 mm et de 2,5 mm. Le plus logique est de commencer par du papier Seyès agrandi 3 mm, puis de réduire progressivement jusqu'à pouvoir écrire, en fin de CP, sur un cahier Seyès ordinaire.
Il est à noter que certains sites proposent d'imprimer du papier Seyès encore plus agrandi : réglure 4 mm, voire 5 mm. Ce genre de support ne me semble pas approprié : en effet, les mains des enfants ne sont pas assez grandes pour qu'ils puissent tracer leurs lettres d'un mouvement des doigts sur un aussi grand format. La lettre f, qui occupe 5 interlignes, aurait sur ces lignages une hauteur totale de 2,5 cm ! C'est beaucoup trop grand pour les petits doigts et cela incite à tracer ses lettres d'un mouvement du poignet.
Les cahiers « double ligne », souvent également trop grands et ne prévoyant pas d'appui pour les d et le t, ne sont pas recommandés.
Les cahiers à petits carreaux ne sont pas appropriés pour l'écriture, leur seul intérêt étant pour les tracés géométriques.
Quelle marque ?
Les cahiers en Seyès agrandi bénéficient généralement d'une réglure bicolore : la ligne d'écriture est imprimée en violet, les ingerlignes en bleu clair.
Ainsi, l'élève peut bien se repérer dans la page et n'a pas de difficulté à percevoir la différence entre ligne et interligne.
En format classique, Seyès 2 mm, cependant, la plupart des marques, y compris Clairefontaine, utilisent une réglure monocolore :
Il est plus difficile pour nombre d'élèves de s'y repérer et il n'est pas rare qu'ils confondent ligne et interligne. C'est pourquoi je recommande les marques qui, comme Oxford ou Conquérant, proposent des réglures bicolores pour leurs feuilles et leurs cahiers.
Quel nombre de pages ?
Les cahiers en Seyès agrandi font généralement 32 pages, ce qui est très bien pour les petits. Cela permet de passer à une réglure plus petite quand le cahier est fini. En Seyès normal, par contre, on peut trouver des cahiers allant de 48 à 200 pages !
Il ne me semble pas raisonnable, à l'école primaire, d'utiliser des cahiers de plus de 96 pages. En effet, l'épaisseur des gros cahiers les rend plus difficilement maniables. Pour le « cahier du jour » (ou cahier d'exercices, cahier de classe, ou toute autre dénomination de votre choix), des cahiers de 48 ou 64 pages devraient être suffisants, ce d'autant plus que les élèves sont ravis d'avoir de nouveaux cahiers au cours de l'année !
De même, si vous mettez en place un cahier d'expression écrite (« cahier d'écrivain » ou autre), il me semble pertinent de prévoir un nombre de pages raisonnable. J'entends souvent des commentaires d'enfants (ou de parents) me disant, un peu dépités : « Ce cahier-là, il est gros, mais on n'a presque rien écrit dedans ». Mieux vaut un petit cahier vite fini qu'un grand cahier tout vide !